Les concerts du mois – Novembre 2023
Les Cantates
Dimanche 5 novembre
à 17h30
Pour la fête de la Réformation
Cantate BWV 79
« Gott der Herr ist Sonn und Schild »
coordination Frédéric Rivoal
La cantate Gott der Herr ist Sonne und Schild fut écrite à Leipzig en 1725 pour l’anniversaire de la Réforme, fêté chaque année le 31 octobre parce que c’est à cette date, en 1517, que Martin Luther avait entrepris sa première action. Sa critique du pouvoir religieux allait plonger l’Europe dans un profond conflit et l’on comprend ainsi pourquoi Bach place sa cantate sous la bannière d’une citation des Psaumes qui fait de Dieu le soleil et l’armure des croyants (Ps 84,12).
La musique s’ouvre par des rafales de timbales accompagnant les cors rayonnants. Le soleil se reflète sur les armures. Tous les instruments bois et cordes sont affutés dans un aigu aveuglant. Rapidement une fugue se met en place, elle démarre sur une bordée de notes répétées suivie de deux envolées rapides. Bientôt tous les instruments s’échangent cet assaut et les voix entrent, au coude à coude, affirmant le texte comme un serment -il ne s’agit pas d’un authentique cantique ancien, mais plutôt d’une écriture « à la façon de ». La troisième section du texte fait basculer la musique dans un véritable tourbillon. Jusqu’à ce que les voix aiguës réémergent du tumulte et lancent la reprise du texte intégral.
Rien ne pouvait s’imposer après un tel déploiement, sinon par contraste le témoignage individuel et des moyens instrumentaux simples.
L’aria d’alto paraphrase le texte du chœur. Aucune idée nouvelle n’est vraiment introduite, mais la mélodie sereine dans sa belle fluidité conforte le croyant dans sa foi. Après avoir énoncé les deux versets, la voix reprend de façon incantatoire, presque insatiablement, la formule «Dieu est notre soleil et notre bouclier».
Au cœur de la cantate, Bach a choisi d’installer un choral. Rare phénomène, mais cette cantate est une célébration et le compositeur renforce ainsi le traitement collectif du propos. Tout l’effectif est donc à nouveau déployé. C’est d’un vrai cantique qu’il s’agit, cette fois. Nun danket alle Gott remonte au XVIIe siècle, écrit par le théologien Martin Rinckart (1586-1649), mis en musique par Johann Crüger (1598-1662), il était devenu à l’époque de Bach l’un des hymnes les plus emblématiques du monde luthérien.
Traitant cette louange avec humilité et déférence, Bach se refuse à tout intervention sur l’écriture originale, sinon une harmonisation et le retour périodique, en écho, de fanfares imitées du premier chœur.
La cantate pourrait bien s’achever là. Bach choisit pour la prolonger d’infléchir légèrement sa trajectoire, de la louange vers la prière, de l’admiration vers l’imploration. Un récitatif de basse appelle Dieu à l’indulgence, provoque une bascule vers le mode mineur et déclenche un duo inquiet. Les voix démarrent sans introduction, elles sont pour ainsi dire poursuivies par les cordes. Est-ce la meute des ennemis ? Ce duo est marqué par de nombreux figuralismes, Bach joue notamment de la synchronisation : une vocalise à deux sur le mot scheinen / briller crée un halo lumineux. Puis, comme si elles s’enfuyaient, les voix se désolidarisent (die Feinde toben / les ennemis se déchaînent). Et finalement les voici réunies et triomphantes avec les invocations protectrices adressées à Dieu.
Conscient qu’il a déjà beaucoup fait jouer l’effet choral, Bach conclut brièvement sa cantate par le choral Nun lasst uns Gott, dem Herren Dank sagen und ihn Ehren de Ludwig Hembold. Une seule strophe qui vient tout autant détendre la tension créée par l’anxieuse prière du duo que couronner -collectivement, avec ampleur- cette célébration musicale.
Christian Leblé
Les Cantates
Autres concerts
Mercredi 15 novembre
à 20h
Valérie Aimard – violoncelle
BACH EN MIROIR
Gabrielli – Bach 3 – Kurtag – Bach 5
à l’occasion de la sortie récente de son CD :
JS BACH
Intégrale des Suites pour violoncelle seul
Un Double ALBUM EnPhases (ENP014)