Les concerts du mois – Mars 2023
Les Cantates
Dimanche 5 mars
à 17h30
Cantate BWV 177
“Ich ruf zu dir, Herr Jesu Christ”
Coordination artistique : Baptiste Guittet
La cantate Ich ruf zu dir, Herr Jesu Christ fut composée au début du second semestre 1732 pour le Quatrième dimanche après la Trinité. Bach choisit de la construire autour d’un cantique écrit Johann Agricola (1494-1566), un des premiers réformateurs, qui entretint avec Luther une relation électrisée par leurs différents théologiques.
Peut-être parce qu’il exprimait le lien direct entre le croyant et Dieu, qui est un élément-clé du luthéranisme, ce chant spirituel fut fondateur et tous les compositeurs l’ont honoré par des pièces d’église, comme le montre ce programme.
Bach lui-même en écrivit une, mais ici c’est son fils Emanuel qu’on entend ici reprendre l’œuvre de papa pour un improbable rafraîchissement, lui ajoutant une introduction et des interludes entre les phrases du choral !
Le plus souvent, quand il a ainsi composé sa cantate sur un cantique, Bach -ou son librettiste- a reformulé certaines parties pour se ménager une variété de formes musicales. Ici, non, il se confronte au défi de cinq strophes rigoureusement identiques.
La première, bien sûr, est transformée en grande introduction chorale. C’est une sorte de concerto grosso dans lequel dialoguent les hautbois, la basse continue, les cordes et un inhabituel violon solo. Dans ce tissu s’insèrent très régulièrement les neuf phrases du choral dont les sopranos ont en charge la mélodie originale.
La dernière strophe, ce sera traditionnellement le choral original harmonisé à plusieurs voix, réalisé par la totalité des instrumentistes et des chanteurs.
Reste trois strophes. Puisqu’elles sont préservées dans leur état original, Bach n’a pas le choix : il doit les traiter sous forme d’airs successifs. Au moins l’étude du texte lui a t-il révélé qu’elles se concluaient toutes par un élément de doute ou de crainte, voilà qui lui donnera chaque fois de quoi provoquer une rupture -fut-elle de dernière minute.
Bach commence par un grand contraste: après le chœur touffu, le dépouillement total. L’air d’alto est une prière pour recevoir confiance et espoir. Le croyant en manque tellement que l’accompagnement réduit au minimum s’interrompt sans cesse. Bach sculpte avec des vocalises les mots importants comme geben (donner), vertrauen (trouver confiance).
Le deuxième air, pour soprano, va exprimer l’apaisement par un balancement ternaire. Le hautbois grave vient épouser le chant d’une façon étonnante, comme un double. Ici encore, la dernière phrase est l’occasion d’une suspension dans la musique, et cette rupture permet de ménager la transition au mieux.
Tout en gardant le même traitement intime, peu orchestré, Bach crée une progression d’air en air et le troisième est au bout du chemin le plus allègre. La confiance s’y exprime par la fluidité et l’alliance du violon et du basson, improbable, appuie le caractère universel et franc du propos : tout le monde peut recevoir la grâce.
Quand la mort vient arrêter la danse, le ténor reprend les dernières phrases de son air et enjambe l’obstacle. Le choral original réapparaît pour conclure la cantate. Dernier accord en mode majeur : la certitude est là que Dieu n’abandonnera pas le croyant.
Christian Leblé
Les Cantates.org
Fédération Musique
& chant de la Réforme
Samedi 11 mars
15h-16h