La cantate Mache dich auf, werde Licht fut donnée par Bach à Leipzig pour la fête de la Purification de la Vierge, le 2 février 1726.
Cette année-là, Bach assouplit le rythme effréné de composition de ses cantates -hebdomadaire !- et emprunta fréquemment ailleurs le matériau musical de l’office dominical. C’est ainsi, par la copie qu’il fit de dix-huit cantates de son cousin Johann Ludwig Bach, qu’on est aujourd’hui en possession de cette musique.
Johann Ludwig Bach (1677-1731) fut compositeur de la cour ducale à Meiningen, à deux cents kilomètres au sud-est de Leipzig. Il succéda à ce poste en 1706 à Georg Caspar Schürmann, compositeur oublié aujourd’hui mais essentiel à l’époque car il fut l’un de ceux qui transplantèrent en Allemagne du Nord les expérimentations stylistiques italiennes (par exemple l’alternance de récitatifs et d’airs, caractéristique de l’opéra) et que Bach allait faire siennes.
De façon systématique, les cantates de Johann Ludwig Bach suivent une construction en deux parties.
La première fait le lien entre Ancien et Nouveau Testament (citation de l’un en introduction, citation de l’autre en conclusion).
Le premier air épouse donc le texte du prophète Ésaïe (60, 1-3). A une base de cordes s’ajoute la couleur de deux hautbois, qui suggèrent lumière et majesté ou qui viennent soudain rehausser un mot, lui donner plus d’importance. C’est une grande annonce figurative (avec une partie centrale lente et sombre, dans laquelle les hautbois se taisent pour créer une «obscurité sonore»).
La citation se poursuit dans le duo entre soprano et ténor, où les instruments imprimant un rythme de marche rapide figurant l’humanité accourant confiante à son sauveur.
Puis le propos devient méditation individuelle. On se tourne vers l’auditeur. On l’invite. Ce sont ses mots, en réponse, qu’on entend dans la prière intime et pleine d’espoir de la soprano.
La première partie se referme sur une citation du Cantique de Siméon (Luc 2, 29-32). Cet air de ténor est une sarabande, noble et sereine. Son rythme exprime bien la plénitude du message.
Si cette première partie était celle des temps bibliques, la seconde est bien vivante, bien présente : le premier air, pour ténor, affiche une nature terrienne et réjouie, l’alto chante à la première personne (c’est le premier «Je» du texte).
La propagation du message chrétien est figurée par un récit où les voix se succèdent et pour finir, après une surprenante petite introduction, le chœur s’engage dans un choral final. Si Bach donne dans ses cantates un caractère concis et dépouillé à cet ultime moment, son cousin tricote la musique en une glorieuse profusion. Le choral original –Durch Adams Fall ist ganz verderbt-est de Lazarus Spengler, un condisciple de Luther, et Bach l’utilisera lui aussi dans deux de ses cantates (BWV 18 et BWV 109).
Christian Leblé
La présentation complète de chaque cantate jouée dans ce cycle au temple du Foyer de l’Âme est accessible sur le site Les Cantates.